Wednesday, December 11, 2019

Bloquer les retraites à 13.8% du PIB et la taille du gateau

A l'occasion du débat sur les retraites, j'entends une bêtise qui frise le mensonge et en dit long sur l'absence d'éducation économique en France. En bloquant la part de la production nationale (13.8%) consacrée aux retraités, on va nécessairement appauvrir les retraités, car ils seront de plus en plus nombreux avec l'allongement de l'espérance de vie (et la baisse de la natalité. Le raisonnement semble logique: plus de monde pour une même part de gateau, cela signifie que la part de chaque retraité va baisser.

Ce raisonnement se tient si on considère que le PIB va rester constant dans le futur. C'est vrai qu'il stagne en France depuis de nombreuses années. Mais dans une économie forte, il serait possible de faire augmenter le PIB aussi vite que le nombre de retraités et cela permettrait donc d'assurer un revenu égal à celui des retraités actuels. Et augmenter la part qu'on donne aux retraités ne signifie pas non plus qu'ils recevront plus. Si la population active chute et la richesse produite baisse de 50%, il y aura mécaniquement moins d'argent pour les retraités, à moins de vouloir complètement spolier les actifs!

La taille du gateau est donc essentielle, et même s'il est plutôt stable dernièrement, rien ne nous assure que ce sera encore le cas quand la population active baissera. Or, ce dernier point montre bien que la façon dont nous organisons la retraite a/aura un impact dynamique sur la richesse du pays. Or, on ne parle pas assez de cette relation entre la retraite et le PIB. Comment faire pour augmenter le PIB dans le futur? Comment faire pour que la retraite aide au développement économique du pays, plutôt qu'il ne soit un frein, un boulet?

L'argument que les retraités font tourner l'économie car ils dépensent leur argent en France ne tient plus car beaucoup vont vivre au Portugal, en Grèce, en Espagne ou font de beaux voyages. Et s'il suffisait de dépenser de l'argent pour faire tourner l'économie, les politiques keynesiènnes des 40 dernières années auraient su éliminier le chômage.

Non, la seule source de richesse, c'est la productivité. Produire plus d'aliments pour donner à manger à une population mondiale qui croit. Produire plus de logements pour les loger. Produire plus de services aussi. Or, comment peut-on augmenter la productivité dans une entreprise ou un pays? Cela se fait souvent par les inventions et les investissements. Par exemple, l'invention de robots qui automatisent les tâches répétitives permet de produire plus avec une main d'oeuvre égale. Mais cela demande aussi des moyens financiers, car construire automatiser des usines est un investissement.

La formation et l'éducation sont donc essentiels. Un travailleur bien formé est plus productif qu'un travailleur sans formation. Ici, les retraités pourraient prendre un rôle de formateur qui leur permettrait d'avoir une occupation moins pénible en fin de carrière.

L'autre interaction entre retraite et productivité est l'investissement. Dans un système par répartition, l'argent passe simplement des actifs aux retraités. C'est un jeu à somme nulle. Ce qui est perdu par les actifs est gagné par les retraités. Cela ne contribue donc pas à créer de nouvelles richesses.
Dans un système par capitalisation, par contre, les économies des actifs deviennent des investissements et contribuent donc au développement économique. Ne pas vouloir passer progressivement à un système par capitalisation, c'est donc ralentir le développement du pays et faire en sorte que ce soient les fonds de pension étrangers qui contrôlent de plus en plus les grandes entreprises françaises!

Les contradictions des manifs contre la réforme des retraites.

Les manifestants sont en colère que le gouvernement réforme les retraites. C'est compréhensible dans un pays vieillissant où une grande partie de la population approche de la retraite. Cette incertitude sur le futur est anxiogène, surtout quand on sait l'état calamiteux des finances de la France (une dette de 100% du PIB et des déficits depuis plus de 40 ans). Mais au lieu de réclamer la possibilité de gérer eux-même l'argent qui est consacré à la retraite, en passant progressivement à la capitalisation, la majorité des Français continue de vouloir que ce soit l'Etat qui gère les retraites. Cette fois, la réforme consiste à mettre main basse sur les réserves des médecins et des avocats, puis de doubler les cotisations des avocats! Peu de gens se battent contre cela!

La France est le pays de la liberté, de l'égalité et de la fraternité. C'est au nom de ces principes que les syndicats sont les plus âpres défenseurs de la retraite par répartition. C'est pour la solidarité entre générations! Or, ils demandent que la réforme Macron ne s'applique pas à eux, mais qu'aux futurs retraités, nés après 1985 (pour le privé). Et tant pis pour l'égalité! Le mot solidarité qui remplace maintenant la fraternité sonne plus que creux: c'est un prétexte pour mieux exploiter et voler les jeunes générations!

A l'occasion des manifs contre la réforme des retraites de Macron, je contemple mes droits à la retraite en France et à Taiwan. En France, ayant bossé 1 an et ayant fait mon service militaire de 10 mois, j'ai cotisé 1 an dans une caisse de cadre et j'ai donc validé 8 trimestres. Depuis que je suis à Taiwan, je n'ai rien versé dans les caisses de retraite des Français de l'étranger, car j'ai préféré capitaliser par moi-même plutôt que faire confiance à l'Etat français.

Comme pour toucher une retraite en France, il faut au moins 146 trimestres (avec une décote de 25%) et que j'ai juste 8 trimestres, il me faudrait travailler au moins jusqu'à 82.5 ans si je commençais à cotiser aujourd'hui. Bref, je ne vais pas faire cela et je ne recevrai donc rien pour mon année de cotisations en France. Durant cette année, j'avais calculé que mon taux d'imposition total frolait le 60% de mes revenus. Je n'avais été capable que d'économiser grosso modo 2000 Euros, un mois de salaire net, en habitant chez mes parents. Et j'ai utilisé cet argent pour partir à Taiwan.

23 ans plus tard, à Taiwan, ma carrière en tant que salarié est incomplète. J'ai cotisé 8 ans environ pour rien dans le système local avant de devenir indépendant (et de ne plus cotiser dans ce système). Bref, mes droits à la retraite par répartition sont les même qu'en France: rien! (Note: j'aurai donc cotisé 9 ans en tout pour ne rien recevoir du tout. Je pose cela ici pour qu'on ne m'accuse pas à la légère de ne pas être "solidaire"...)

Heureusement, les cotisations retraite à Taiwan sont faibles et la retraite y est très faible également. Ce n'est donc pas une trop grande perte, mais une perte quand même pour quelqu'un qui a une carrière atypique. (On peut voir à mon propre exemple que l'Etat n'arrive pas à prévoir toutes les situations.)

Ainsi, je n'attends rien des Etats français ou taiwanais. Mais je ne suis pas inquiet pour mon avenir ou ma retraite. Je n'ai aucun droit sur des prestations futures, mais j'ai tous les droits sur les économies que j'ai pu mettre de côté par mon travail et qui ont fructifié dans l'immobilier, la bourse et l'assurance-vie. Et, grâce aux faibles prélèvements obligatoires à Taiwan, ma femme et moi avons pu mettre une part substantielle de nos revenus de côté. (Je n'ai jamais eu de revenus mirobolants, ayant toujours travaillé au droit local et non comme expat).

Certes, nous avons essuyé quelques grosses pertes lors de placements risqués dans la high tech taiwanaise et depuis nous investissons plutôt dans les gros index que dans des petites firmes. La capitalisation n'est pas un long fleuve tranquille, et de meilleurs rendements impliquent toujours une prise de risque. A chacun de savoir quel niveau de risque il est prêt à prendre. Mais je me sens mieux en sachant que ma retraite viendra de ce qui m'appartient, plutôt que de ce que l'Etat prendra aux actifs dans 20 ans!

Chaque parent devrait souhaiter ne pas être une charge pour ses enfants. Et souhaiter qu'ils puissent rapidement se constituer leur propre capital et affronter la vie en hommes et femmes libres qui peuvent dire "non" à un employeur si celui-ci ne les rémunère pas correctement, ou bien pouvoir lancer leur propre petite entreprise... 

Saturday, December 7, 2019

Une émission, une idée

Les face-à-face avec Zemmour sur CNews sont un événnement médiatique. Ses interventions font tellement polémique que certains (à gauche) veulent le faire taire et le bannir des médias. Et comme l'appel à la censure a souvent l'effet inverse (ex: Playboy ou Lui pour qui fut ado avant Internet), je suis devenu un spectateur régulier de l'émission. En effet, chaque débat est l'occasion d'un échange d'idées que M. Zemmour sait rendre intéressant. Il n'hésite pas à prendre des positions opposées à celles où on l'attend. Il sait reconnaitre là où il est d'accord avec son adversaire. Il sait aussi articuler sa pensée et l'expliquer avec des mots simples, mais aussi des références historiques. Et son autre qualité est de ne pas donner trop d'idées d'un coup, mais de les distiller peu à peu dans chaque émission. Cela m'a donné l'idée de faire ce best of condensé et d'en proposer mon commentaire ou ma critique.

26 novembre 2019: face à René Dosière
"Les Français n'attendent pas l'exemplarité des hommes politiques, mais l'efficacité, l'utilité". Voilà un superbe exemple de contre-pied et de prise de position risquée qui rend le débat intéressant. En effet, il faut du culot pour dire qu'on s'en fout de comment les politiques dépensent l'argent des contribuables et que le budget de fonctionnement de l'Elysée, de Matignon... on n'en en rien à faire. Cependant, Zemmour a raison de dire que si on se rabat là-dessus pour les critiquer et les contrôler, c'est car on est mécontent de leur performance. Or, la politique, ce n'est pas de se choisir des enfants de coeur et de saints hommes pour diriger l'Etat. La politique, c'est souvent de prendre des décisions difficiles et de les faire appliquer. La politique, c'est savoir trahir, soudoyer... mais surtout c'est obtenir des résultats. Or, effectivement, depuis l'Euro, les politiques français ressemblent plus à des petits gestionnaires infoutus d'équilibrer leurs comptes, et ils ne méritent pas les traitements et frais de bouche qu'ils s'octroyent.

27 novembre 2019: face à Jean-Christophe Lagarde
"Il n'y a pas d'Europe. Il n'y a pas de nation Européenne..." Zemmour est contre l'idée d'une Europe fédérale, et dit que seul une nation peut envoyer son armée au combat. Une armée Européenne n'est pas possible, car personne à Bruxelles n'a la légitimité nécessaire pour l'envoyer se battre et se faire tuer. Cet exemple concentre bien ce qui est au centre d'un Etat, d'une nation. C'est une notion sur laquelle j'ai évolué, surtout après avoir fait mon service national dans la brigade franco-allemande. Et, bien que franco-allemand, je dois m'empresser d'ajouter que j'ai fait mon service du côté français. Car bien que cette brigade, pensée comme un embryon d'armée européenne soit binationale, j'ai pu constater qu'il n'y a pas de fusion possible entre les 2 armées. Elles sont trop différentes. Depuis, je crois que le mieux est si l'Europe se limite à un grand marché unique, et que les alliances militaires, industrielles... sont mieux gérées au cas par cas, avec des coalitions de nations différentes, plutôt que chaque fois à 27 ou 28 (je ne sais plus combien il y a de pays dans l'UE!)

28 novembre 2019: face à Odon Vallet
"L'époque n'aime pas l'autorité, la verticalité. Mais moi cela me plait", dit Zemmour. Sur ce point, je suis en désaccord avec lui. Pour moi, l'autorité n'a pas perdu de son importance avec 1968, mais avec l'éducation des citoyens. Autrefois, on avait des élites peu nombreuses et très éduquées. Il était rationnel de leur reconnaitre une autorité sur un grand nombre de sujets. Mais de nos jours, avec la société de la connaissance, d'Internet... chaque citoyen occidental peut vite se faire un opinion sur des sujets pointus. Les boulots stupides à la chaine sont de moins en moins nombreux. Les boulots dans les services, eux, demandent une intelligence du contact social, de l'EQ (Emotional Quotient). La valeur ajoutée du service vient de la formation des salariés, de leur intelligence émotionelle. Bref, dans la société moderne, la grande majorité des gens exercent des responsabilités et sont en mesure de comprendre aussi bien que les dirigeants. C'est ce qui permet justement la démocratie. Et je dirais que c'est une contradiction chez Zemmour. Il dit aimer le peuple français, et qu'il a raison quand il vote 'Non' à l'Europe de Maastricht, mais il est pour l'autorité du chef. Or, le chef de l'Etat, c'est justement lui qui est passé outre et n'a pas suivi l'avis du peuple!!

2 décembre 2019: face à Julien Aubert
"Les Chiraquiens sont des gens qui n'ont aucune conviction et qui se soumettent à la gauche et à la doxa médiatique."

Avec cette phrase, Eric Zemmour résume la cause du mal français de ces 40 dernières années. Ce n'est pas tant la faute aux socialistes qui menèrent une politique de gauche d'augmentation du poids de l'Etat. C'est ce à quoi il faut s'attendre d'eux. Non, le problème vient de la droite chiraquienne qui s'est soumise à la gauche et aux médias (surtout publics) et qui ne fit pas de politique de droite.
Bien vu!

3 décembre 2019: face à Jean Daniel
"'La concurrence permet d'éliminer les rentes' selon le libéralisme classique, mais selon le grand historien Fernand Braudel 'le capitalisme n'a jamais respecté les règles de la concurrence car le capitalilisme c'est justement essayer d'empocher le maximum de rentes' donc il y contradiction entre les 2."

C'est la première phrase du débat qui vaut le coup d'être vu dans son entièreté. Je m'y arrête car on sait que Zemmour, s'il est de droite, n'est pas réputé libéral. Pourtant, on voit ici qu'il a l'esprit fin et qu'il sait dénicher les points faibles de ses adversaires. Avec cette contradiction, il espère déstabiliser un libéral qui défendrait le capitalisme, mais ici cela ne porte pas, car Jean Daniel a défendu la concurrence. Là où Zemmour a raison, c'est que chaque entreprise (et chaque personne) essaie de gagner de l'argent en travaillant le moins possible, et donc par la rente. Mais comment empêcher cela? Pour les libéraux, la concurrence est le meilleur moyen. Si l'Etat fixe trop de règles, il risque de créer des situations de monopole. Et il n'y a rien de tel qu'un monopole protégé par l'Etat. C'est ce qu'on appelle alors le capitalisme de connivence.

4 décembre 2019: face à Céline Pina
"Il y a contradiction entre notre modèle social et la mondialisation... les frontières ouvertes".

C'est ce que disait aussi Milton Friedman, le grand libéral prix Nobel. A la différence que Milton Friedman voulait convaincre d'abandonner le socialisme, car cela attire trop de gens qui viennent pour les aides sociales! Pour Zemmour, c'est l'argument qu'il avance, avec un certain génie, pour convaincre la gauche de fermer les frontières à l'immigration: la meilleure façon de rester socialiste, c'est de ne pas faire venir encore plus de pauvres du sud. Et plus tard il utilise encore une idée d'un homme de gauche, Engels, "au-delà d'un certain seuil, la quantité devient une qualité". Bref, quand il y a un trop grand nombre d'immigrés, ce ne sont plus eux qui s'assimilent à la France, mais nous sommes ceux qui quittent les territoires qu'ils habitent (le 93...)

5 décembre 2019: face à Michel Maffesoli
"La politique, c'est désigner l'ennemi, selon Carl Schmitt." Et sur quoi Maffesoli dit que "l'ennemi actuellement c'est la technocratie, l'énarchie" et Zemmour dit qu'il est bien d'accord.

On est trois! Et sur ce point, je veux bien rappeler qu'il ne s'agit pas de désigner tout le secteur public comme ennemi. La plupart des fonctionnaires n'y sont pour rien dans la structure du système de l'Etat. Les seuls responsables sont les politiques trop timorés pour réformer dans le sens de la libéralisation et les bureaucrates conservateurs qui veulent toujours plus de pouvoir et d'impôt. Macron, lui n'est pas timoré, mais ses réformes ne vont pas assez loin et consolident encore plus la technocratie.

9 décembre 2019: face à Denis Olivennes
"Le système français (des retraites) s'appuyait sur ce trépieds: le protectionisme, la politique nataliste et la préférence nationale (...) et les socialistes ont tout foutu en l'air dans les années 80".

Ces 3 arguments de Zemmour sont très faibles et il a pratiquement tort sur toute la ligne. On peut dire que ce trépied s'applique aussi à Cuba ou à la Corée du Nord, mais visiblement ces 2 pays n'ont pas la prospérité de la France et leur retraités sont dans une misère extrême. C'est qu'il doit y avoir une autre explication (hint: le système libéral). Passons en revue les arguments les uns après les autres:

1. le protectionisme. Cela me rappelle l'argument de Zemmour sur les droits de l'homme universels donnés par la France au monde en 1789. Il dit que la France pouvait être universelle quand elle dominait le monde. Etre universel, c'est être ouvert. Ce n'est pas être défensif. Or, dans l'après seconde guerre mondiale, ce sont les USA qui poussent tous les pays à s'ouvrir car ils ont une certaine avance technologique et capitalistique, mais cela ne les dérange pas trop que l'Allemagne et le Japon arrivent à se redresser, car la prospérité amène la paix. La France s'est aussi progressivement ouverte durant les 30 glorieuses et le commerce mondial a toujours cru plus rapidement que le commerce national. Et quand il y eut du protectionisme, cela n'a jamais marché (les VHS...)

2. La natalité française a longtemps été un peu plus haute qu'ailleurs, mais il est curieux de ne pas entendre dire Zemmour que ce fut surtout le fait de populations immigrés provenant de pays dont la natalité était plus forte encore. Or, partout dans le monde la natalité baisse. Seules les communautés religieuses plus traditionnelles (Amish aux USA, juifs orthodoxes en Israël) ont une natalité forte en Occident. La crise de la foi en Europe ajoute probablement des peurs au malaise économique.

3. La préférence nationale. Ici, pour Zemmour, cela a le sens d'absence d'immigration. Ici, il n'a pas tort et je renvoie au débat du 4 décembre. Mais l'expression 'préférence nationale' est d'habitude le pendant du protectionisme: les politiques préfèrent dire cela que 'va vous empêcher d'acheter moins cher ailleurs'! Là où je ne suis pas d'accord, c'est que les immigrés pourraient facilement contribuer positivement à la société si celle-ci était libérale (aucune aide sociale, pas de SMIC).

10 décembre 2019: face à Jean Lassalle
Zemmour commence par faire l'éloge du "personnage" de Lassalle, mais il termine en montrant la vacuité de ce politique qui a été au MoDem et ne semble pas avoir de vrais convictions. Du coup, cela ne m'intéresse pas d'assister au débat. Mais on voit là une qualité de Zemmour qui montre son objectivité: il ne voit pas les gens en noir ou blanc. Il est capable de voir les points positifs et négatifs des politiques. Et il faut faire attention quand il vous lance des fleurs, car ce qui suit peut être destructeur!

11 décembre 2019: face à Gaspard Gantzer
"La comm est fondamentale, car ce n'est pas de la comm. (...) La comm est devenue une idéologie en soi, c'est l'idéologie des élites mondialistes, moins hiérarchique, moins verticale, plus cool, (...) plus sociale-démocrate, plus féminine..." Zemmour aurait pu parler de 'pensée unique', le terme qu'on a utilisé depuis Baladur, il me semble. C'est la critique du fait que la politique de la droite est semblable à celle de la gauche depuis 1983.  Mais c'est aussi la critique du fait que les médias ne supportent plus qu'un seul type de discours autour de certaines valeurs et que ceux qui, comme Zemmour, défendent autre chose (patriotisme, libéralisme économique) sont ostracisés. Sur ce point, je donne raison à Zemmour.
Sinon, c'est bien Gantzer qui a lancé Zemmour sur l'immigration en critiquant que Paris devienne une nouvelle Babylone (une ville où l'on parle 1000 langues, donc pleine d'étrangers).

12 décembre 2019: face à Nicolas Baverez
Zemmour ressort la critique du libéralisme classique qu'il avait fait face à Madelin: "Le juge a un pouvoir excessif (dans l'Etat de droit actuel) ... et il faut revenir au suffrage universel et au pouvoir de la majorité." Et les 2 exemples qu'il emploie sont ces 2 décisions du Conseil constitutionnel:
1. "Au nom de la fraternité, on a le droit de faire entrer des immigrés clandestins."
2. "Au nom d'un obscur article dans la déclaration des droits de l'homme qui parle de la gratuité de l'enseignement, le gouvernement n'a pas le droit de faire payer des droits d'inscription plus importants dans les universités pour les étrangers."
"Vous (N. Baverez) appelez cela d'état de droit, moi j'appelle cela le gouvernement des juges".

La réponse de M. Baverez est d'ordre général et il dit aussi que la critique de Zemmour est fondée, mais il ne mentionne pas plus ces 2 exemples. Or, leur examen montre que leurs positions ne sont pas opposées du tout. Voyons les 2 décisions dont parle Zemmour en détail:

1. Le libéralisme est pour la liberté de circulation, mais il est surtout pour l'état de droit, c'est-à-dire vivre dans une société où règne la loi qui est la même et s'applique à tout le monde. Or, cet espace où s'applique la loi est la nation et chaque nation a des frontières au-delà desquelles s'appliquent d'autres loi. Le passage de la frontière n'est donc pas un acte anodin. C'est pourquoi, chaque pays a un grand nombre de lois qui définissent les conditions de ce passage, quels étrangers ont le droit de venir, pendant combien de temps, sous quelles conditions... Or, si des juges disent que le principe de fraternité est supérieur aux lois et qu'il faut laisser entrer les clandestins en faisant fi des lois existantes, ce sont ces juges qui sont hors-la-loi! Zemmour a raison en disant que ces juges créent ainsi une nouvelle règle, c'est à dire une nouvelle loi. Or, ils n'ont pas ce droit. Seul le peuple et ses représentants peuvent faire les lois. Le rôle des juges est simplement dire si la loi est conforme aux grands principes et si elle est bien appliquée. Du point de vue libéral, ces juges n'ont pas fait leur travail, car les lois qui régissent nos frontières laissent la place à la fraternité (ex: le droit d'asile).

2. Dans un pays, on peut admettre que tous ses habitants profitent de l'éducation supérieure de la jeunesse. Même si on est ouvrier, on est bien aise d'avoir des médecins pour être soigné et des ingénieurs pour bâtir des routes et des usines. On peut donc concevoir que l'Etat et donc ses contribuables paient pour l'éducation de sa jeunesse, car elle en retire aussi les bénéfices. (Nous ne parlons pas de 'gratuité', car ce mot est trompeur. Aucun prof et aucune institution ne fournit un enseignement gratuit: il est toujours payé par quelqu'un (l'élève, ses parents ou le contribuable). Or, dans le cas d'étudiants étrangers, on s'attend à ce qu'une grande partie d'entre eux retourne dans leur pays d'origine. Le contribuable français ne tirera donc qu'un bénéfice très maigre de l'éducation de ces étrangers. La seule raison de faire ainsi, à la rigueur, serait s'il y a réciprocité et qu'un nombre similaire d'étudiants français va étudier dans les pays d'où viennent les étudiants étrangers.

Bref, il est tout à fait normal et logique de faire payer des frais d'inscription supérieurs aux étrangers. Ce n'est pas du tout contraire aux droits de l'homme ou aux lois de la République. Le libéralisme classique voudrait même que l'éducation soit privée afin que chaque étudiant décide si il pourra ou non gagner plus en suivant telle ou telle formation. Cela éviterait de subventionner des formations sans réels débouchés! Zemmour et Baverez peuvent s'accorder là-dessus!

Mais cette discussion sur le pouvoir des juges montre l'importance du choix de ces juges. On le voit surtout pour la cour suprême aux USA. Les conservateurs choisissent des juges qui interprètent les lois en fonction de ce que dit la constitution. Les démocrates nomment, eux, des juges qui interprètent la constitution en fonction de leur idéologie socialiste et de l'air du temps. Effectivement, c'est une dérive anti-démocratique et anti-libérale. Cela nous rappelle qu'aucun système n'est parfait, mais dépend de la sagacité de ses acteurs. 

Ajout du 15 décembre: Concernant le pouvoir des juges (constitutionnels), Nicolas Baverez aurait pu regretter qu'ils n'exercent pas suffisamment leur pouvoir! Je me rappelle que lorsque F. Hollande  voulait taxer les super riches à 75%, certains avaient objecté que ce serait anticonstitutionnel. Or, si on ajoute tous les impôts et cotisations actuelles, on est déjà à plus de 66% pour la plupart des cadres en France. Quand l'Etat vous prend les 2 tiers de ce que vous gagnez, vous n'êtes plus vraiment libre. Vous travaillez d'abord pour les autres avant de travailler pour vous. La révolution de 1789 fut faite contre des impôts bien moins lourds... Bref, cela fait depuis longtemps que les juges du Conseil Constitutionnel auraient du dire 'Non' à la folie taxatoire des gouvernements successifs, bien qu'ils aient été élus démocratiquement! Le problème, c'est le biais gauchiste de ces juges et leur absence de lecture originaliste de la constitution.

16 décembre 2019: face à Pascal Boniface
Le débat sur la Chine et les USA est intéressant, mais on ne se pose pas la question qui devrait être essentielle: pourquoi la Chine a-t-elle une telle croissance? N'y a-t-il pas des choses qu'elle fait bien et dont nous devrions nous inspirer pour retrouver la croissance chez nous?
Zemmour et Boniface sont souvent d'accord sur les USA, mais pas sur le multilatéralisme. Mais le clash le plus important entre les 2 vient quand il est question d'islamo-gauchisme. Pascal Boniface récuse ce terme qui est injurieux (cf. isme) et est un peu la réponse des nationalistes quand on les qualifie de racistes. Quand on en arrive aux injures, il est difficile de continuer un débat, mais M. Boniface a su garder son calme et a continué de défendre ses idées. Il a notamment été d'accord avec le concept d'"islamophobie". Or, sur ce point, il je lui donne tort et la meilleur explication ne vient pas de Zemmour, ma de cette vidéo d'Hamed Abdel Samad, un ancien frère musulman:

En France, tous les citoyens ont les mêmes droits. Et Zemmour a raison de dire qu'en "portant le voile, les femmes musulmanes se stigmatisent elles-même".

17 décembre 2019: face à Damien Abad (président de LR à l'AN)
"LR c'est mort (...) Vous êtes un modéré. Vous êtes hors du temps. LR c'est des centristes modérés et mous." répète Zemmour, un peu comme face à Julien Aubert. Damien Abad lui rétorque sa mesure la plus forte au conseil général de l'Ain: la création d'une brigade anti-fraude au RSA et il semble très content de lui-même d'avoir pu la faire malgré l'opposition de la gauche. Or, lutter la fraude aux aides sociales n'est pas une politique libérale de droite. C'est simplement de la bonne gestion. Ce président du groupe LR a fait un bon boulot de bureaucrate, d'élu local, mais il n'a pas de vision libérale ou de vision nationale. Une politique libérale consisterait à supprimer le RSA et à encourager des organismes privés à venir en aide aux plus démunis en les réinsérant par le travail. En effet, le RSA crée une dépendance qui sape l'honneur, l'estime de soi des gens qui le reçoivent. Cette politique de redistribution vise surtout à soudoyer ces électeurs pour les faire voter à gauche, et avec elle la pauvreté ne fait que croitre en France. Et puis cela crée une trappe de la pauvreté. Sous un certain seuil de revenus, les avantages sont si nombreux que cela incite à rester pauvre au lieu de gagner plus. Zemmour a donc raison sur l'état des LR, même s'il l'analyse sous un angle un peu différent.